7 janvier
2013
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MARIAGE HOMOSEXUEL
par Shirley dans la catégorie Reportages

Mariage homosexuel en France:
le projet de loi présenté en Conseil des ministres

 

Promesse du candidat Hollande à la présidence, le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples gay a été présenté en Conseil des ministres. Un texte qui suscite une vive opposition à droite et au sein de l’Église catholique.

 

Le projet de loi ouvrant la voie au mariage et à l’adoption pour les couples de même sexe a franchi mercredi l’étape du Conseil des ministres alors qu’il reste l’objet d’une forte opposition de la droite et des églises mais ne va pas assez loin pour les associations homosexuelles.

Le président François Hollande a déclaré que ce projet devait être « un progrès pas seulement pour quelques-uns mais pour toute la société ».

Il a souhaité aussi que le débat soit « maîtrisé » et « respectueux des opinions comme des croyances ».

Selon l’article 1er du projet de loi obtenu par l’AFP, « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe ». De la possibilité de se marier, découlera, pour les couples homos, le droit d’adopter ensemble un enfant.

Finie donc, au grand désarroi des associations homosexuelles, l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes ou les questions de filiation, renvoyées par le gouvernement à une future loi sur la famille.

Mais ce projet pourrait évoluer au Parlement, qui l’examinera en janvier pour laisser plus de temps au débat. Le Parti socialiste a déjà promis un amendement sur la PMA.

« Le projet de loi est une grande avancée, très importante pour la protection juridique des familles homoparentales », a réagi mercredi Stéphanie, 41 ans, membre de l’association des parents gays et lesbiens et habitante d’un village de l’Ain, tout en regrettant que le texte ne permette pas d’adopter l’enfant de son conjoint sans être marié ni recourir à la PMA.

Ces jours derniers, les opposants ont haussé le ton, le cardinal André Vingt-Trois taxant le projet de « supercherie », des propos qui lui ont valu les foudres de la gauche, d’associations et d’internautes.

Mais l’Église catholique marche sur des œufs, car elle craint de se laisser entraîner par les intégristes, comme l’Institut Civitas, qui appellent à manifester le 18 novembre. D’autres opposants, comme l’association anti-avortement Alliance Vita, organisent des rassemblements la veille, le 17.

Signe des crispations qui entourent le projet, la maire PS de Hantay (Nord), qui devait célébrer samedi le mariage de deux femmes, a décidé d’annuler « cet acte civil non autorisé par la loi », après avoir reçu des réactions « violentes » et « menaçantes ».

Alors que le Grand Rabbin de France, Gilles Bernheim, s’est lui aussi élevé contre le futur texte, des associations de défense des homosexuels ont appelé l’opinion et les parlementaires à résister aux « pressions » religieuses.

 

 

« Cesser de raconter n’importe quoi »

SOS homophobie a notamment souligné que parmi les pays européens – dont l’Espagne et le Portugal – qui ont ouvert le mariage, l’adoption et la PMA aux couples de même sexe ces dernières années, « aucun n’a sombré dans la décadence annoncée ».

Hasard du calendrier, le tribunal constitutionnel espagnol a d’ailleurs validé mardi la loi sur le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels tandis que plusieurs Etats américains ont voté en faveur du mariage gay.

L’association Inter-LGBT (lesbienne, gay, bi et trans) a pour sa part appelé à manifester mercredi soir près de l’Assemblée nationale.

Prudent, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a pour sa part souligné que les règles religieuses ne pouvaient être opposées au projet même si l’union de personnes de même sexe est « non conforme » à l’islam.

Sur le front politique, la droite s’est aussi emparée du sujet, certains allant même jusqu’à promettre l’abrogation du texte en cas d’alternance tandis que Marine Le Pen ou Christine Boutin, présidente du Parti Chrétien Démocrate, connue pour ses positions anti-Pacs en 1998, demandent un référendum.

Des pétitions « pro » (psychanalystes) ou « anti » (maires qui refuseront de célébrer ces unions) font également florès sur internet.

Selon un sondage Ifop pour Le Monde publié mercredi, les Français sont favorables à 65% au mariage homosexuel et à 52% à l’adoption par des personnes de même sexe.

 

 

Idées pour faire lever le débat

De fait, au niveau de leurs droits, il existe une différence de régime juridique entre les couples hétérosexuels et les couples homosexuels. Au nom d’une notion d’égalité de droits indifférente de l’orientation sentimentale et sexuelle, ceux-ci demandent une égalité de traitement qui passe par une levée de l’interdit. Les arguments suivants sont avancés :

– pour offrir à toute personne la possibilité de fonder une famille (de nombreuses Constitutions à travers le monde lui confèrent le titre de droit fondamental),
– pour permettre aux familles homoparentales déjà existantes (en union libre) de disposer d’un moyen de reconnaissance de leur famille en tant que telle,
– pour banaliser l’homosexualité, diminuer le communautarisme et contribuer à faire disparaître l’homophobie.
– conception des enfants, comme partout, d’un homme et d’une femme: parentalité, couple et procréation ne sont pas nécessairement synonymes
– coexistence des parents sociaux, qui n’ont pas conçu l’enfant mais se conduisent comme des parents, et des parents biologiques ;
– la vie sexuelle ne préjuge pas des compétences parentales.

À l’inverse, les opposants au mariage homosexuel présentent plutôt le mariage comme une spécificité hétérosexuelle, où l’homme et la femme sont certes égaux, mais pas identiques ni interchangeables (notamment par rapport à la maternité, et ses conséquences sur la vie du couple et la vie professionnelle des mariés), ce qui implique des aménagements par définition inutiles entre deux personnes de même sexe.

Les considérations religieuses sont très présentes dans les motifs d’opposition (rares étant les confessions qui admettent l’homosexualité ou qui ne sacralisent pas le mariage hétérosexuel).

Enfin, une toute petite minorité considère que le mariage n’est pas (ou plus) l’affaire de l’État, et que donc la question n’est pas d’étendre le bénéfice du mariage, mais plutôt de le supprimer en tant que procédure d’État. En faveur de cette opinion sont avancées des considérations
– religieuses : caractère religieux du mariage ;
– philosophiques : non intervention de l’État dans les relations entre personnes ;
– pratiques et sociales : le mariage était justifié par le soutien aux femmes avec enfants, il ne l’est plus maintenant dans les pays où les femmes peuvent travailler et bénéficier de l’aide sociale indépendamment de l’existence d’un mari.

 


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